Culture
«Il faut en permanence se remettre en question»
06.11.2020 / FAO n° 89
Tatyana Franck, comment vous sentez-vous maintenant que votre musée a fermé ses portes?
C’est un moment de grande introspection qui nous permet de penser qui nous sommes, où nous allons. «Le dernier éteint la lumière», le dernier événement que nous avons organisé, coïncide aussi avec la fin de la rédaction de notre projet scientifique et culturel que nous rendrons public à la fin de l’année. Il donnera les objectifs et la vision du Musée de l’Élysée pour les cinq prochaines années. Mais il est important de préciser que même si nous ne recevons plus de public, le musée continue de fonctionner. Nous allons profiter de cette fermeture pour nous déployer dans les salles et préparer un grand chantier des collections. Nous aurons une chaîne de travail où les équipes vont réaliser un recollement, une comparaison entre l’inventaire électronique et les œuvres physiques de nos collections. Nous allons donc ouvrir toutes les boîtes pour trier, séparer, dépoussiérer, conditionner, emballer, mettre sur palettes. Un travail colossal qui concerne un million d’objets.
Votre sentiment à l’heure de quitter cette bâtisse historique?
C’est une opportunité exceptionnelle de pouvoir se professionnaliser davantage encore. Nous disposerons d’espaces pensés pour un musée de la photographie avec des réserves climatisées à 18 degrés pour les noirs et blancs, à 12 degrés pour la photographie couleur et à 6 degrés pour les négatifs. Aujourd’hui, nous évoluons dans une maison transformée en musée. C’est très charmant, avec le parquet qui grince, la poussière qui tombe des plafonds. Mais les espaces restent exigus. Nous ne pouvons ni accueillir un public en situation de handicap ni présenter nos collections. Nous déployer et travailler dans un bâtiment pensé pour le médium photographique dès le départ est vraiment une grande chance.
Quid de votre identité? Le public vous connaît aussi pour ce lieu.
Le public local, vaudois, suisse, est très attaché à cette Maison de l’Élysée. Mais ce qui fait la force du musée, ce n’est pas la bâtisse. C’est son ADN. L’identité, l’accueil, les valeurs que porte notre institution. L’innovation, la générosité. L’aspect humain. Tout l’enjeu est de garder cet ADN, cette identité, qui fait la particularité du Musée de l’Élysée. Je ne pense pas que nous puissions le perdre. Parce qu’un musée, c’est une équipe, qui travaille d’arrache-pied pour construire un nouveau lieu.
Craignez-vous toutefois de perdre une partie du public local qui vous connaît à travers vos murs historiques?
Garder ce public fait partie de nos défis. Raison pour laquelle nous lançons un journal en ligne, «L’Élysée hors champ» afin de maintenir le contact avec nos visiteurs. Le but est justement de leur faire comprendre que le musée déménage, mais garde son âme.
Vous disiez que la force du Musée de l’Élysée vient aussi de l’équipe, du collectif. Pensez-vous que PLATEFORME 10, trois musées ensemble, va vous rendre plus forts encore?
Trois musées dans un même lieu avec des médiums complémentaires, c’est unique. D’autres quartiers des arts existent dans le monde, mais les musées ne peuvent souvent pas collaborer. Notre force est justement celle de pouvoir dialoguer, penser ensemble, partager. Et ce n’est pas qu’un projet culturel, mais aussi social, urbanistique, environnemental, politique. Avec ce déménagement, nous allons également attirer un autre ty pe de public, composé davantage de touristes, qui ne vient pas au Musée de l’Élysée pour le moment. Cela nous permettra aussi de croiser les publics. Certains ne vont pas dans un musée de la photographie ou dans un musée des beaux-arts. Le fait de disposer de trois musées sur un seul et même site, au cœur d’une gare, au cœur d’une ville, est propice au mélange des publics.
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