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Prisons

Des mesures pour endiguer la surpopulation carcérale

14.02.2025 / FAO n° 13

Des mesures pour endiguer la surpopulation carcérale
Présentation des mesures pour endiguer durablement la surpopulation carcérale. Dr. Benjamin Brägger (bureau Clavem), Raphaël Brossard, chef du Service pénitentiaire vaudois, Vassilis Venizelos, Conseiller d’État, Prof. Christophe Champod, École des sciences criminelles de l’UNIL.
Crédit photos: Jean-Bernard Sieber

Dans le canton de Vaud, la surpopulation carcérale entraîne des conséquences importantes à plusieurs niveaux depuis de nombreuses années, tant du point de vue des conditions de détention et de travail dans les établissements pénitentiaires qu’en matière de lutte contre la criminalité. Face à cet enjeu majeur, le DJES a confié deux mandats d’étude à des experts reconnus sur les questions de politique carcérale et de criminalité. Les conclusions de ces analyses permettent au Canton d’émettre des propositions concrètes pour atténuer le phénomène.

Causes multifactorielles
Les deux rapports – l’un produit par le Bureau Clavem, dirigé par le Dr Benjamin Brägger, l’autre par l’École des sciences criminelles de l’Université de Lausanne sous la direction du Prof. Christophe Champod – mettent en lumière plusieurs facteurs pouvant expliquer cette pression sur le système carcéral vaudois. Parmi les principaux constats, il est relevé un taux de détention avant jugement (DAJ) significativement plus élevé que la moyenne nationale, avec une durée de séjour en préventive atteignant parfois plus du double de la norme suisse. Par ailleurs, la criminalité vaudoise, bien qu’alignée avec les tendances nationales, se distingue par une prévalence d’infractions liées à la loi sur les stupéfiants. Cette situation s’explique en partie par une priorité accordée à la lutte contre le deal de rue.

D’un point de vue structurel, les experts constatent que l’offre carcérale s’est avérée insuffisante au regard des besoins, et ce, depuis plus de vingt ans. Bien que 250 places de détention aient été créées depuis 2012, la demande reste forte, ce qui pousse à envisager des solutions tant immédiates que sur le long terme.

Enfin, le manque de données statistiques exploitables a été identifié comme un frein à l’analyse, notamment intercantonale, de ces politiques publiques.

Plan d’action à court et long terme
Pour pallier cette situation, le Canton de Vaud présente un plan d’action articulé autour de plusieurs axes et leviers d’action. À court terme, une quarantaine de places supplémentaires seront mises à disposition hors canton d’ici le printemps 2025. Parallèlement, il est prévu d’augmenter la capacité carcérale avec l’installation d’espaces modulaires sur le site des Établissements de la plaine de l’Orbe. Le Canton va aussi exploiter toute sa marge de manœuvre pour renforcer les mesures alternatives à la détention (type semi-détention, TIG ou bracelets électroniques). Enfin, il s’agira d’améliorer encore la coordination entre tous les acteurs de la chaîne pénale afin de mieux prioriser et cibler les délits pouvant faire l’objet d’incarcération, à l’image de ce qui se fait dans la lutte contre le deal de rue.

Sur le long terme, la stratégie de réinsertion 2024-2030 et le déploiement de la justice restaurative permettront de lutter contre la récidive. Le DJES entamera également des démarches au niveau fédéral dans le but de proposer des modifications législatives afin d’encourager davantage le recours à des mesures alternatives à la détention, telles que le travail d’intérêt général et le bracelet électronique. Même si le Canton de Vaud se distingue actuellement par un recours intensif à ces mesures alternatives, la possibilité d’y faire appel pourrait être élargie légalement. En outre, les amendes et peines pécuniaires non payées pourraient être recouvrées d’une autre manière que par une peine privative de liberté. Le Canton envisage également la création d’un Observatoire de la criminalité pour améliorer la qualité des données statistiques.

Enfin, il apparaît évident, à la lumière de ces études, que la construction de nouvelles infrastructures, si elle n’est pas suffisante, est toutefois indispensable pour rattraper le retard et atteindre les objectifs. Inscrite dans le programme de législature du Conseil d’Etat, la prison des Grands-Marais offrira 410 places supplémentaires à l’horizon 2032.